Archive for décembre, 2009
You are currently browsing the Ahrizgateau ! blog archives for décembre, 2009.
You are currently browsing the Ahrizgateau ! blog archives for décembre, 2009.
Je suis fan absolue de Haruki Murakami dont j’ai lu presque toute l’oeuvre. Je ne sais pas trop pourquoi, cette passion me faisait délaisser bêtement Ryu Murakami (je pensais peut-être que je n’avais pas la place pour deux auteurs du même nom dans ma bibliothèque – gourde que j’étais). Bref, je m’y suis mise et la découverte de cet écrivain m’a glacée. Il faut dire que j’ai commencé par Lignes.
Imaginez une nuit à Tokyo où vingt destins s’entrecroisent dans une ronde macabre et névrosée. L’extrême solitude entraîne un déchaînement de violence qui finit par s’exprimer dans les coups, la folie, les brûlures ou le sexe. Et bien sûr, ça se termine au fond d’un trou perdu, profond et anonyme, où personne ne viendra jamais vous chercher. Le ton est délirant et les voix les plus muettes sont assourdissantes. On se sent entraîner dans un cauchemar glauque et intime qui parle d’un Japon qu’on ne voudrait jamais connaître.
Ryu Murakami dit s’être inspiré d’histoires vécues.
Depuis, je regarde bizarrement le caissier de mon combini (j’ai peur qu’il ne soit un serial killer).
J’évoquais récemment la sécurité au Japon, en vous racontant une bonne histoire de pervers démasqué avant son opération des pommettes. Pour alimenter le sujet, je vous propose aujourd’hui de parler d’un fléau dévastateur pour les pauvres piétons innocents dont je suis : le vélo.
Croyez-le ou non, dans ce pays si discipliné et si respectueux, le vélo s’est taillé une place à part. Il s’est construit un espace de liberté qui ne connaît aucune limite.
Les sens interdit ? Connaît pas.
Les trottoirs ? Connaît pas.
Les feux rouges ? Connaît pas.
Les petits enfants qui courent partout ? Voit pas !
C’est infernal. Le vélo n’a ni lois ni règles et j’exagère à peine en vous disant que je risque ma vie tous les jours.
Mais le pire de l’histoire, c’est que rien ne l’arrête. Il pleut, paf ! le cycliste sort son parapluie d’une main et conduit de l’autre. Le portable sonne, paf ! il utilise sa deuxième main pour saisir l’appareil et conduit avec ses jambes seulement. Il a un bébé, allez hop ! dans le panier arrière. Un deuxième enfant, blang ! dans celui de devant. On n’en sort pas !
Finalement, je me demande si j’ai bien fait de commander un vélo au Père Noël…
Selon la presse japonaise, une chinoise a récemment été arrêtée pour avoir tenté d’entrer illégalement dans le pays. Pour déjouer le système de sécurité anti-terroriste mis en place depuis 1997, elle se serait fait opérer, intervertissant ses empreintes digitales : index droit à gauche et vice versa.
Il faut dire qu’à l’aéroport (notamment) chaque étranger a le devoir de faire vérifier ses empreintes, une obligation qui hérisse certains… Pourquoi les Japonais ne sont-ils pas soumis à cette règle s’énerve un bon ami qui vit ici depuis 7 ans, elle serait la même pour tous. Et pour montrer son mécontentement, il exhibe régulièrement son majeur aux douaniers en demandant s’il s’agit du bon doigt.
Résultat, il est fiché « individu dangereux ».
Un ami me conseillait récemment de faire un tour à Disneyland. Pour voir quoi avais-je demandé naïvement. Les files de Japonaises habillées en Minnie, m’avait-il rétorqué dans un sourire, ça vaut le coup d’oeil ! Et ce Français de m’expliquer que les nippons avaient su garder en eux une incroyable capacité d’émerveillement. Ooooh ! Aaaaah ! Kawaaaaai ! Ils s’extasient devant un rien avec une candeur et une spontanéité formidables, d’où ce plaisir à vivre sa passion jusqu’au bout, sans deuxième degré ni moquerie mal placée.
Tout à l’heure, un concert gratuit était organisé à Ebisu. Les chanteurs étaient affublés de perruques afro noires et leur bonnet de Père Noël leur tombait à moitié sur les yeux. Certains avaient la note fausse, d’après l’expert à mes côtés. Croyez-vous que cela a gêné les spectateurs et que des pfff blasés se sont fait entendre ? Non, trois non ! Ils ont écouté, applaudi, fredonné et pris des photos. Et moi… j’ai fait exactement comme eux.
C’est un fait : il est possible de voyager dans de petits ryokans à des prix très raisonnables, à condition bien sûr…. d’être seul. Les logements facturent en effet au nombre de voyageurs et non à la chambre. Pour une nuit, l’étudiant baroudeur déboursera 4 500 yens quand la famille March (2 parents et 4 filles) s’en sortira à 27 000 yens, une somme assez rondelette, ma foi. Résultat, pour passer quelques jours à Sendai, j’ai choisi l’option auberge de jeunesse, une solution que je recommande uniquement aux habitués des grands froids (les canadiens, les esquimaux, les sibériens, les ours polaires…).
Que je vous explique.
J’arrive dans cette ville de charme accompagnée de nombreux comparses. Je trouve ce youth hostel sans souci pour une fois et là, formidable : l’accueil est chaleureux, l’endroit paraît chauffé (la cuvette des toilettes l’est en tous cas), les portes coulissantes sont bien ajustées. Je fais le tour du propriétaire, découvre les salles de bain fumantes, les espaces de repos au poêle (!) avec distributeurs de boissons et… la chambre. Jolie, la chambre, avec de GRANDES fenêtres. Le vitrage est un peu fin, mais je ne veux pas faire la fine bouche. Le système de climatisation réversible souffle le chaud. Super ! Petit hic : un papier placardé sur l’appareil précise qu’entre minuit et 7 h du matin l’arrivée électrique sera coupée. Ah ?…
Le soir arrive. Je vais me coucher.
Je déplie mon futon dans lequel est glissée une serviette de toilette et me glisse sous trois couvertures. Il fait bon… ça ne va pas durer. Au beau milieu de la nuit, comme prévu, clac ! plus de chauffage. Dehors, il fait 2°, les fenêtres sont GRANDES (et le vitrage fin). Mon corps a bien chaud, mais ma tête se transforme bientôt en glaçon. C’est terrible ! J’ai une pensée émue pour nos grands-mères en bonnets de nuit… Je finis par attraper la serviette évoquée ci-dessus et me rendors dessous. Je me réveille à 7h00 au son d’un mégaphone qui annonce d’une voix tonitruante que le petit-déjeuner est prêt (en japonais). Ma serviette est toujours collée à mon front bleui, je me sens comme un toucan lost in Alaska. Misère !
Dans un pays où traverser au feu vert constitue la rebelle-attitude par excellence (près de chez moi, les policiers surveillent le passage pour piétons et gare aux coquins qui ne respectent pas la signalisation), il existe un incroyable espace de liberté : la nomikai.
Vous connaissez sans doute. Il s’agit de ces réunions entre collègues qui sont prétexte à un relâchement maximum. Personnellement, je n’ai jamais eu l’occasion de participer à ce type de soirée (mais j’aimerais, un jour). En revanche, j’ai été spectatrice lointaine et je me suis beaucoup amusée. On boit, on chante, on fume, on vomit, on glousse, on applaudit, on se roule parmi les plats. C’est très gai, mais surtout… personne ne vient déranger ces businessmen en leur demandant de se faire plus discrets. On laisse s’exprimer leurs excès avec une tolérance inouïe. Chapeau !
Choquée. Je suis choquée.
(Et pourtant, il m’en faut beaucoup.)
Je viens d’apprendre concrètement deux déclinaisons de verbe que je ne dois pas utiliser car je suis… bête ? moche ? méchante ? C’est encore pire. Parce que je (ne) suis (qu’) une femme ! J’en reste comme deux ronds de flans. Il s’agit d’un impératif et d’un prohibitif : fais ci, ne fais pas ça. Ainsi, c’est un peu comme si on autorisait les garçons à dire « tais-toi » alors que les filles se contenteraient d’un « veux-tu te taire ».
Pas d’accord !
Mais quelle idée j’ai eu de me lancer dans le Japanese Language Proficiency Test !
Malgré des heures de cours et de révision, j’ai l’impression que je ne décrocherai pas ce fameux certificat, inexploitable professionnellement parlant (le niveau 4 se rapproche d’un CP japonais) mais si doux pour l’ego du débutant… Cela dit, il m’aura beaucoup appris sur l’organisation des examens à la mode d’ici.
Tout d’abord, la convocation : elle précise mon nom, le numéro qui m’est attribué, le bâtiment où je dois me rendre, la salle qui m’accueillera et un plan d’accès à mon centre d’examen – en l’occurrence l’immense université de Chofu. Tous les horaires sont indiqués à la minute près, on me recommande même d’emporter mon bento.
Après avoir sué sang et eau pour trouver l’endroit (ce qui ne présage rien de bon puisque je suis censée maîtriser tout le vocabulaire des directions en japonais), j’entre donc dans une vaste pièce. Les tables sont propres et parfaitement alignées, les numéros sont bien visibles, le personnel en costume porte un brassard fluo marqué « staff », il est serviable et m’indique immédiatement où sont les toilettes (je salue intérieurement le bon sens pratique japonais).
A l’heure dite (toujours à la minute près, soit 9h45) : on commence.
Le personnel dépose les feuilles d’examen sur chaque table, puis il repasse dans les rangs pour distribuer le cahier d’exercices. Peut-être pensez-vous que chacun se rue alors sur sa copie, le stylo dégoulinant d’encre ? Non, trois fois non. Le personnel revient d’abord vérifier, place par place, que vous êtes bien la personne dont il a la photo sur sa liste. Il dévisage chaque candidat longuement et je me dis que j’ai une mine affreuse. Vous vous impatientez ? Tss tss… il faut encore écouter le CD dont la voix vous explique tout ce qu’il ne faut pas faire : copier sur le voisin (c’est mal), faire sonner son téléphone (c’est mal), mâcher du chewing-gum (c’est mal) ou sortir sans autorisation (ouh là c’est horrible). Et pas question de rigoler. A la première incartade, c’est carton jaune, ensuite c’est carton rouge et dehors. On annonce enfin qu’on peut commencer.
Ouf, j’allais m’endormir !
PS : J’ai essayé de copier sur ma voisine de 10 ans, mais elle était trop loin, quel dommage ! Je vous aurais raconté la suite du carton rouge.
Il existe près de Shinjuku, un coin protégé de quelques rues étroites où s’alignent les bars. Des bars si petits que vous n’y tiendrez pas à dix, sauf à boire sur la tête de votre voisin. Cet endroit s’appelle le Golden Gai et on peut certainement s’attendre à y croiser une bande de yakuza, quelques travestis et une poignée de cinéastes célèbres. Moi, j’y étais hier, sur les traces de Wim Wenders interviewant Chris Marker dans son film Tokyo Ga. Cette rencontre culte a été filmée dans un bar minuscule appelé la Jetée et tenu par des cinéphiles avertis qui parlent un français parfait. Pour vous y rendre, repérez la porte avec un chat, montez un escalier dont les murs sont punaisés d’affiches de film, entrez. La pièce fait 9 m2 au plus, avec le comptoir, deux bancs et deux tabourets hauts en cuir patiné. Les murs sont bordés d’étagères où sont disposés d’innombrables bouteilles de whisky japonais signées par les personnalités célèbres ayant fréquenté l’endroit dont Coppola, Tarantino, Wenders… On y mange des olives et du saucisson. Derrière moi, Jean-Paul Belmondo et Jean Seberg faisaient les fous.
Lorsque j’ai su compter jusqu’à 10 en japonais je me suis dit « c’est gagné ». Je vais pouvoir commander 4 jus d’orange au café, acheter 6 timbres à la poste, indiquer que nous sommes 5 pour déjeuner, réserver 2 billets de train pour le 3 septembre (le 9 ème mois)… à moi la vie facile quoi !
Quelle erreur, ma fille ! Ici, question chiffres, rien n’est jamais gagné car on ne compte rien de la même façon. Pour que vous vous rendiez compte du casse-tête que cela représente, voici quelques exemples :
– les choses plates et minces, paf un compteur.
– les cahiers et livres (que vous pensiez ranger dans la catégorie ci-dessus petits malins), un autre compteur.
– les vêtements, encore un autre.
– les (gros) animaux, un énième,
– les petites bêtes, les liquides, les objets cylindriques… vous les compterez encore différemment !
C’est à en perdre son latin japonais !
PS : Le bébé éléphant, je me demande si faut le compter comme un petit ou un gros animal, vous en pensez quoi vous ?