Archive for février, 2010
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Si vous vivez à l’étranger, vous connaissez certainement ce besoin impérieux qui vous pousse, à chaque retour au pays, à foncer droit… au Monoprix. Ah ! les alignements de shampoings, les montagnes de fruits, les rayons de magazines féminins, quel bonheur. A l’occasion d’un court passage à Paris, me voici donc à la caisse de cet illustre magasin, mon panier de plastique rouge bien en main. Mon tour arrive, je le pose sur le tapis roulant et j’attends. La caissière me regarde et m’explique d’un air de maîtresse pas bien contente de son élève de 3 ans : « Madame, il faut disposer vos courses ici et ranger votre panier là, sous les bonbons« . Je me tape la main sur le front. Mais c’est bien sûr ! J’avais complètement oublié qu’il fallait procéder de cette manière. Au Japon, on ne vide jamais son panier : la caissière le fait pour vous. Elle prend chaque achat, le comptabilise, puis le pose dans un second panier que vous emmenez dans un espace aménagé où vous rangerez tranquillement vos affaires. Ainsi, vous n’êtes jamais stressé par la personne affreusement pressée qui vous suit et qui aimerait que vous balanciez au plus vite vos courses dans vos sacs afin de payer à son tour. Là-bas, on est cool, et ça me manque (c’est fou, je n’aurais jamais penser écrire ça un jour).
J’assistais récemment à un cours de cuisine japonaise. Parmi les nombreux élèves, une charmante trentenaire avouait n’avoir jamais réalisé le moindre maki – ces rouleaux d’algues garnis de riz vinaigré au centre duquel on trouve du concombre, du saumon, de l’omelette ou de nombreux pickles locaux. L’organisatrice en profitait pour confirmer et se désoler : ah ! ces jeunes d’aujourd’hui, ils ne savent même plus cuir un oeuf ! Quel dommage ! Elle expliquait alors que les plats tout préparés étaient peu à peu en train de prendre le pas sur la cuisine familiale, préparée avec amour à la maison. Un vrai saccage !
Hélas, je dois reconnaître qu’elle a sans doute raison.
Ici, les bento (ces ravissants plateaux repas que le monde entier envie au Japon) sont si équilibrés, si joliment présentés, si appétissants et si bon marchés qu’il est tentant de ne plus toucher une casserole de sa vie. On les mange sur le pouce à l’heure du repas – bien calé sous une tonnelle recouverte de glycines dans le parc du coin – on les emmène dans le train, on les ramène chez soi, bref, on les adopte avec une facilité déconcertante. D’après ce que j’ai lu, il s’en vendrait 12 millions d’unités par jour. Pour autant, faut-il vraiment souhaiter que ce chiffre augmente encore ?
Parfois, je me dis que je suis complètement aveugle.
En regardant le sol des rues, je pensais parfois « tiens, étranges ces bandes jaunes ». Je ne saisissais pas bien le pourquoi de leur existence. Décorations ? Lignes de démarcation ? Quelle erreur ! Après plus d’un an de vie ici (heureusement que je ne suis pas détective), j’ai enfin percé le mystère. Il s’agit de chemins dont les motifs en relief guident les aveugles jusqu’au métro ou les arrêtent au croisement.
Forte de cette illumination soudaine, je me suis rappelée que les transports publics sont toujours équipés d’ascenseurs et que des plans en braille sont installés un peu partout dans la ville.
Au Edo Tokyo Museum de petites reproductions de bâtiments anciens s’offrent à toutes les mains. Que vous soyez aveugle ou enfant, vous pouvez toucher les moindres aspérités architecturales de tel ou tel monument. C’est à la fois ludique et si bien pensé.
Enfin, incroyable mais vrai : lorsqu’une personne arrive en chaise roulante sur un quai, le chef de gare accourt avec une plaque métallique qu’il place de manière à faciliter la montée de l’handicapé dans la voiture.
Bien vu !
Les Japonais partagent avec les Anglais cette passion obsessionnelle pour le parapluie. Il faut dire qu’avec la mousson de juin et les pluies de septembre, il vaut mieux sortir couvert. Ce ne sont pas de misérables gouttelettes qui tombent du ciel, mais des trombes d’eau qui peuvent vous arroser durant des semaines. Heureusement, il se vend des « kasa » à chaque coin de rue au prix modique de 300 à 500 yens.
En bon Japonais cependant, vous ne devriez pas avoir à faire un tel achat. Pourquoi ? Parce que la météo fait également ici l’objet d’un culte particulier. On connaît les prévisions heure par heure, et si vous manquez ces dernières à la télévision : elles sont diffusées dans le train. Vous connaissez le pourcentage de chance de pluie et la violence du grain (8 niveaux répertoriés). Oui, c’est précis ! Vous savez donc forcément qu’il va pleuvoir et vous avez pris vos précautions. Elémentaire, mon cher Watson !
Enfin, sachez que tout est fait pour vous simplifier la vie en cas d’averse. Le plus petit magasin tient un porte-parapluies à votre disposition. Dans certains, vous disposez même d’une espèce de fourreau en plastique qui permet d’éviter que votre accessoire ne goutte partout (le bon vieux système du préservatif). Dans les grands restaurants en revanche, vous le placerez dans une consigne spécialement adaptée.
Et quand il ne pleut pas, pas de souci : les Japonais rangent leur parapluie… et sortent leur ombrelle.
Ah les dîners aux chandelles, les bijoux précieux, le voyage en gondole ou les dessous affriolants… vous en rêviez mesdames pour cette Saint Valentin ? Tintin, vous n’aurez rien ! Car ici, les femmes ne reçoivent pas : elles offrent. Et pas n’importe quoi, hein, des chocolats. Cette tradition a le mérite de simplifier grandement la tâche. Inutile de se casser la tête à trouver une idée originale. Pour marquer le coup, il suffit d’aller dans le magasin du coin, vous y trouverez des pyramides de boîtes de toutes sortes ou de kits prêts-à-l’emploi avec moules en forme de coeur naturellement. Malgré les origines commerciales de l’affaire, vous trouvez le concept romantique ? Attendez la suite. En effet, les dames ne se contentent pas d’offrir quelques douceurs à l’être aimé, elles arrosent tous les collègues. Elles font ainsi entre 4 et 5 heureux à la fois. Eh oui, pourquoi s’embêter, surtout lorsqu’on est célibataire ? Dans un mois précisément, le 14 mars, les garçons devront répondre à ces demoiselles en leur rendant la politesse. S’ils ont été sensibles à l’attention, ils offrent des chocolats en retour. S’ils sont déjà en main ou qu’ils ne sont pas intéressés, tintin… elles n’auront rien.
Si l’évocation de ce brave professionnel vous fait déjà frémir et même claquer des dents, venez donc rendre visite au mien. Vous changerez bientôt d’avis sur ce métier injustement dénigré.
Chez mon dentiste, on est accueilli par de charmantes demoiselles en blouse blanche ou bleue (je pense que la couleur dépend du poste : assistante dentaire ou simple secrétaire) dont on peut apprécier le sourire impeccable. Pour attendre, on vous installe dans de beaux fauteuils juste à côté d’un écran géant qui diffuse un film digne des pires films d’horreur et dans lequel on découvre tous les maux dentaires possibles et imaginables (même en japonais, on comprend). Les images sont fascinantes et surtout… elles vous confortent dans l’idée qu’il faut venir ici régulièrement. Bien joué doc’, tu as gagné une cliente fidèle !
On vient ensuite vous chercher et là… arghl… comment expliquer son souci dans la langue du pays ? Heureusement, à force de gestes on se fait comprendre. Le dentiste sort alors un livret qui explique tous les actes qu’il va pratiquer EN ANGLAIS ! Radio, pose de vernis, comblement d’une carie… tout est traduit. Et pour le cas où vous n’auriez pas compris, il allume son ordinateur et vous passe un petit film explicatif – court, mais clair.
Je vous passe le détail des soins. Je vous précise juste qu’il vous lave consciencieusement les dents avant de commencer et qu’il prend soin – pour les petits – de vous protéger avec un bavoir à motifs rigolos. Une amie m’expliquait que son dentiste va plus loin encore : pendant la consultation, il diffuse des dessins animés au plafond, ainsi le temps passe plus vite et de façon plus distrayante.
Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais moi, ça me donne envie de manger des bonbons.
Une amie débattait récemment avec un Japonais, lui expliquant, droite dans ses bottes, que les « Français travaillent pour vivre alors que les Japonais, eux, vivent pour travailler ». Et ma foi, je crois qu’elle touchait là une vérité bien ancrée dans la réalité.
Faisons quelques calculs : ici, il est mal vu de travailler moins de 11 heures par jour (attention, cela ne veut pas dire être productif sur toute cette durée, cela signifie être présent dans les locaux en faisant mine d’être débordé). Évidemment, on bosse 5 jours sur 7 minimum ce qui correspond à une semaine de 55 heures en moyenne, sans compter les temps de trajet. Quant aux vacances, 2 semaines vous sont généralement octroyées, mais pas question de les déposer toutes (vous seriez considéré comme un extra-terrestre).
Heureusement… travailler au Japon vous offre quand même un avantage sur tous les autres salariés du monde : les jours fériés. 15 au total chaque année ! Et lorsque l’un d’entre eux tombe un dimanche… il est aussitôt reporté au lundi. Franchement, c’est appréciable. Aujourd’hui, nous fêtions donc le jour de la Fondation de l’état. Le mois prochain, ce sera l’Equinoxe de printemps. Ce qui prouve qu’on peut aussi se la couler douce ici… hé hé à bon entendeur !
… comment l’as-tu trouvé ?
Eh bien ma foi, riche en surprises.
En pénétrant l’impressionnant Ryôgoku Kokugikan, j’imaginais qu’il fallait faire silence, se déplacer doucement et prendre des airs de supporter pensif et introverti. Évidemment, j’avais tout faux ! Dans ce stade, c’est la vie qui prend ses aises. On se balade avec un bébé qui braille sans risquer l’opprobe, on grignote une brochette de poulet grillé, on ajuste son fond de teint, on discute le bout de gras, on boit une bière que l’on ouvre grâce au décapsuleur individuel mis à disposition dans chaque boxe (véridique), on prend des photos bien sûr, avec flashes et tripodes. Bref, l’ambiance est carrément bon enfant.
Et les combats ? Rapides. 20 secondes en moyenne paraît-il. Certains semblent instantanés, d’autres paraissent s’étirer indéfiniment dans le temps. Choc de titans, tension maximum, suspense haletant. Oui, c’est un peu comme dans les séries noires sauf qu’on ne sait jamais qui va gagner à la fin. Dans ce sport sans pitié, chaque lutteur met en effet sa vie en jeu au cours d’un match qui durera moins d’une minute. Et les retournements de situation arrivent ! Dimanche, c’est le modeste Goeido (membre du dernier rang de la première division) qui a battu le yokozuna Hakuho. Le premier, par son courage exceptionnel, se verra octroyer une pension à vie. Le second, champion suprême en titre, a eu droit à une volée de coussins envoyés des quatre coins du stade.
Enfin, en dehors du combat lui-même, les âmes sensibles seront peut-être retournées par les rituels qui le précèdent, notamment le lancer du sel purificateur qui fait retomber une pluie de grains blancs sur les lutteurs et l’arbitre. L’image est magique !
Si vous êtes de ceux (suivez mon regard) qui réduisent l’art du Sumô à de gros bonshommes qui se mettent dessus, laissez-moi vous corriger sans délai : vous avez tout faux ! Non seulement il s’agit d’un sport qui demande à ceux qui le pratiquent une abnégation, une technicité et une force mentale inouïes, mais, parce qu’il est empreint de rituels shintoïstes, il est également l’un des représentants majeurs de la culture japonaise.
Hier, j’ai assisté à mon premier tournoi. Colossal !
PS : pour votre culture, chers lecteurs, je vous recommande « Mémoires d’un lutteur de sumô » de Kazuhiro Kirishima ainsi que les photos renversantes de Philippe Marinig.
Ah les cartes, ces petits sésames qui vous permettent d’acheter moins cher ! Ici, ils sont une institution. Tous les magasins en proposent, et tous les clients en disposent. Mais attention, hein, ce n’est pas comme en France. Inutile de remplir un questionnaire en trois exemplaires, et surtout, vous ne risquez pas d’être inondé de publicité qui vous rappellera combien vous avez de points disponibles en vous pressant de venir les utiliser. Au Japon, on vous fout une paix royale. C’est appréciable. En allant chez Peko par exemple, demandez votre « pointo cardo« , elle vous sera aussitôt remise sous forme d’un rectangle de carton à faire tamponner à chaque achat. Arrivé à un certain montant, paf ! la récompense tombe, sonnante et trébuchante : vous avez 500 yens à utiliser comme bon vous semble. Ce n’est pas énorme, d’accord, mais c’est simple, tangible et toujours apprécié. Le seul hic de l’affaire, c’est qu’à accumuler les cartes, vous portefeuille risque d’exploser. Moi par exemple, j’en ai de Kitchen Court, Eric Kayser, ABC Mart, Bic Camera, Tokyu Hands, 55 Station, Santoku, Lalaport… A force, j’ai du mal à m’y retrouver.