Archive for mai, 2010
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Qui sont les parasites ? Ceux qui vivent improductifs et reclus comme Uehara, ce garçon obèse et dépressif, exclu de son école, de sa famille et de la société ? Ceux qui investissent la toile pour manipuler l’information et s’amuser à susciter l’espoir ou contraindre à la violence ? Les parasites sont-ils des virus mystérieux qui modifient le caractère et invitent au massacre ? Et si, finalement, les parasites rassemblaient tous ceux qui vivent privés d’envie et de but, ceux qui vivent, aveugles, une vie qui leur échappe ? Dans ce roman dense et visionnaire, Ryu Murakami interroge de nouveau la capacité de chacun à prendre son destin en main. L’auteur écrit ainsi « l’espoir n’est pas une chose qu’une société puisse offrir, c’est une chose que les individus doivent formuler eux-mêmes et qui reste toujours à découvrir » en s’affranchissant ou non des parasites, et quelle qu’en soit l’issue.
Je ne sors jamais sans ma bible. Je vais où elle me dit d’aller. J’évite ce qui m’est déconseillé. Bien mal m’en a pris. Fichu guide ! A Kumamoto, le Lonely Planet m’enjoint de réserver dans ce minuscule minshuku (sorte de chambre d’hôtes) silencieux, propre et bien tenu. Le personnel est serviable et on peut même, avec un petit supplément, prendre son repas. J’y vais les yeux fermés.
Arrivée sur place, je rencontre la propriétaire qui m’emmène à ma chambre d’un pas traînant. Il y a trois lits pour quatre personnes, qu’importe, nous nous serrons. Dois-je laisser mon nom, remplir un formulaire ? Non. Nous serons des voyageurs anonymes, un parfum de mystère flottera autour de nous, pourquoi pas. J’inspecte la chambre, le tapis est taché, la climatisation est équipée d’un système à pièces. La propriétaire doit être une vaillante militante pro-environnement. Faut pas trop laver. Faut limiter sa consommation d’énergie. J’approuve. J’ouvre le placard pour y ranger mes affaires : tiens, il est déjà encombré de couvertures en vrac et de gros cartons ramollis. Allons, allons, soyons positifs. Après ce voyage qui a réussi à me faire combiner en une seule journée train, bateau, car et tramway, un bon bain me fera du bien. Nous descendons avec trois serviettes pour quatre (comme le nombre de lits alloués, il faut rester logique de bout en bout), le o-furo nous attend. Je me déshabille, prend une douche et soulève les planches rafistolées qui recouvrent le bassin. VIDE, il est vide. Je m’énerverais volontiers mais je suis trop crevée. Allez hop, au lit. Le calme décrit par mon guide comme l’un des points forts de cet établissement rattrapera tout. Hélas, je ne dormirai pas de la nuit… le karaoké d’à côté fonctionne à plein.
Je suis fâchée. Pour cette chambre, j’ai payé près de 9 000 yens la nuit, soit dans les 81 euros. Evidemment, nous étions quatre, mais quand même ! C’est cher payé pour des conditions aussi miteuses.
Une amie française jubilait à la vue d’une canette abandonnée dans les rues de Tokyo. « Ah quand même ! Les Japonais ne sont donc pas tous sur-hommes !« . Parfois, ils se laissent aller et dévient du chemin bien droit qui leur tracé depuis des générations. Il me semble alors qu’ils sont un peu comme vous et moi, imparfaits.
Derrière le visage impassible et la courtoisie codée se cachent de véritables cocottes-minutes, des hommes (et des femmes) sous pression prêts à exploser. Il faudra alors écraser l’autre ou s’en prendre à soi-même. Les chiffres sont tombés. Au Japon en 2009 : 32 845 suicides ont été recensés par la police, plaçant le pays au 8ème rang des nations les plus atteintes par le mal de vivre.
Ah là là chers lecteurs, je suis allée à Kumamoto et j’ai mangé du sakura, je m’en suis mis jusque là !
Des fleurs de cerisiers penserez-vous, voilà un drôle de plat, mais pourquoi pas finalement, il faut s’attendre à tout dans ce pays. Je vous accorde un point, car on se régale ici de glace ou de gâteau parfumé au sakura, mais il s’agit là d’autre chose. Voyons, c’est rouge, c’est fort… c’est… c’est de la viande de cheval ! Absolument. Étonnant, non ? Pour ne pas citer l’animal et rappeler au monde notre nature carnassière – ce qui serait trivial au possible – on utilise un terme plus imagé, plus élégant, plus fleuri, quoi ! Je vous invite donc à la prudence. Amis végétariens, si vous allez du côté d’Izu et que l’on vous propose un nabe aux pivoines : refusez. On vous apporterait une marmite remplie de bons gros morceaux de… sanglier.
Aussi incroyable que cela puisse paraître, on ne vous refuse jamais rien ici. Question de tact. On ne veut pas vous heurter, vous embarrasser, vous gêner. Pourquoi vous jeter un « non » à la figure alors qu’on peut vous exposer de nombreuses excuses qui sous-entendent avec finesse que cela ne va pas être possible ? Pour vous exercer, voici quelques exemples très simples :
Puis-je réserver pour 8 heures ce soir ?
Réponse : ah… ça va être difficile (traduction : c’est impossible).
Pouvez-vous me livrer du kérosène ce dimanche ?
Réponse : ah… lundi, oui (donc, c’est mort pour dimanche).
Et si nous allions au cinéma ensemble demain ?
Réponse : un peu… désolé… (traduction : tu veux vraiment un dessin).
Et ainsi de suite….
L’histoire se complique lorsque vous avez besoin d’une réponse précise. Connaissez-vous le chemin pour aller à l’office du tourisme ? Au lieu de vous répondre tout bonnement non – ce qui ne vous vexerait pas outre-mesure – l’ignorant préfèrera souvent vous indiquer une route fantaisiste qui vous perdra davantage. C’est un peu idiot, non ?
PS : Le « non » ne se dit quasiment qu’en une seule occasion. Si quelqu’un vous remercie encore et encore, vous pourrez laisser tomber un non confus qui équivaudra à : cela est trop, vraiment vous me gênez, restez mesuré voyons, tout le plaisir est mien…
Pour me reconnaître, avait dit cet ami japonais à ma tante, guettez un homme petit, avec des yeux bridés et un appareil photo autour du cou. Cette description, lancée comme une boutade, reflète pourtant bien l’idée que l’on se fait habituellement des Japonais. Après deux ans de vie ici, je crois cependant pouvoir affirmer que cette caricature n’est presque plus valable. Les filles sont blondes et ondulées, les garçons prennent de la hauteur grâce à d’astucieuses talonnettes (mais pas seulement) et les yeux ronds sont bordés de cils démesurés. En revanche… l’appareil photo, lui, est toujours là et bien là. Il mitraille. Il immortalise. Il s’exhibe et c’est à qui aura le plus gros, le plus long ou le plus lourd. On le porte à bout de bras, mais il se pose volontiers sur un trépied que l’on emportera avec soi, en plus des quelques kilos d’objectifs nécessaires. Heureusement, pour vous éviter tout embarras quant au choix de l’emplacement, les Japonais prennent généralement soin de vous indiquer l’endroit où vous prendrez la photo idéale (c’est là !). Pour cela, ils placent un panneau indicatif avec mention des lieu et date (Mont Aso, 5 mai 2010 par exemple), ils ajoutent un escabeau (pour l’angle de la prise de vue), ainsi qu’une ligne qui vous permettra de faire la queue. Ensuite, chacun viendra à tour de rôle prendre sa photo souvenir. Une fois de plus, j’admire le bon sens pratique japonais. Pour autant, je crains qu’avec ce système votre image ne soit… un peu clichée ?
Mais qu’elles avaient l’air bonnes ces brochettes !
Il faut dire qu’après un réveil à 6h du matin, 1h36 de train, 40 min de bus, 4 min de « cable car » et 2h de balade en terre volcanique aussi brûlante que venteuse, j’aurais avalé un éléphant.
Ah ces brochettes ! sur ce barbecue rudimentaire (mais tant pis), arrosées d’épices mystérieuses et savamment retournées par un cuisinier rustique à souhait, je me suis précipitée dessus. Et là, mes amis, quel délice. Je déclare donc, en fine connaisseuse, « ce boeuf est vraiment est délicieux ». Hélas, me répond mon cher compagnon de route, d’après les kanji que je vois là, tu viens d’avaler du cheval. Arghl !
NB : pour comprendre la drôlerie de ce billet, il faut savoir, que je me refuse absolument à manger de cet animal familier, tout comme j’évite le lapin. Par ailleurs, mes convictions m’incitent à renoncer à l’ours (j’en ai quand même un pâté dans mon frigidaire) ainsi qu’à la baleine.
C’est une ville que l’on réduit trop souvent au terrible drame qu’elle a vécu lors de la seconde guerre mondiale. Pourtant, Nagasaki n’est pas que ça. Loin de là ! Pour moi, elle est le symbole fragile de l’ouverture du Japon à l’influence étrangère. Les voiliers portugais chargés de missionnaires s’y sont arrêtés il y a 400 ans, laissant derrière eux d’émouvantes églises, une importante communauté chrétienne et de délicieux gâteaux en forme de cake et au goût de biscuits à la cuiller qu’on appelle ici « casutera« . Les commerçants hollandais y ont établi leurs commerces et introduit de nombreuses découvertes scientifiques. Les marins chinois s’y sont installés en nombre avec leurs coutumes, leur cuisine et leurs temples rouges. Chaque année en octobre, ils font encore parader dans les rues d’immenses dragons de toutes les couleurs. C’est donc une ville qui ne ressemble à aucune autre dans ce pays, une cité paradoxale, à la fois douloureusement marquée et fabuleusement enrichie par l’histoire. Vous l’avez deviné, Nagasaki est une perle rare qui dessine un autre visage du Japon, peut-être celui qui me touche le plus.
Voilà un livre qui s’avale d’une traite et laisse un épais goût de sang dans la bouche. Kenji a vingt ans. Il officie comme guide de nuit pour étrangers dans le quartier chaud de Tokyo. C’est ainsi qu’il va rencontrer Franck, un américain à la peau étrangement artificielle dont les contradictions vont semer le doute dans l’esprit du narrateur. Qui est Franck : un touriste qui veut s’amuser, un voyeur un peu malsain, un redoutable assassin ? Que veut-il et que va-t-il faire de Kenji ?
Dans ce récit tendu à l’extrême, Ryu Murakami interroge la violence d’une société oppressive et dictatoriale qui célèbre l’individualisme et réprime toute possibilité de révolte. Renvoyés dos à dos, le Japon et l’Amérique glissent ensemble vers une issue fatale qui verrait la folie s’imposer comme seule et unique issue possible.
Excellent, mais difficile à avaler.