Archive for juin, 2010
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Mes encouragements de pom-pom girl ont porté leurs fruits puisque les « samouraïs bleus » ont décroché cette nuit leur billet pour les huitièmes de finale. Il va falloir que je dégotte un bar où suivre le match contre le Paraguay. Chaude ambiance en perspective. L’occasion est trop rare pour ne pas la saisir !
J’en profite pour vous dire que j’ai repéré de magnifiques maillots aux couleurs de l’équipe et frappés de la célèbre Hello Kitty – certainement de futurs collectors.
Le sport ici est un sujet sérieux.
Il donne lieu à une fête annuelle, undokai, à laquelle tous les petits Japonais participent. Le matin, à côté de l’école française, de nombreux salarymen font leur exercice et les mamans curieuses en profitent pour jeter un oeil sur ces sportifs en costume – le spectacle est loin d’être déplaisant, croyez-en une experte. Si vous vous baladez autour du palais impérial, vous serez forcément bousculé par un coureur, deux coureurs, trois coureurs… Et ce n’est plus de footing dont il faudra parler, mais de bolides humains lancés à pleine vitesse comme aux 24 heures du Mans.
Mais le sport vénéré ici, c’est le base-ball ! Il y a des stades à hauts filets et aux gigantesques spots un peu partout dans le pays. Le week-end, les battes sont sorties et hop ! hop ! hop ! tous sur le terrain.
Aujourd’hui cependant, Coupe du monde oblige, c’est le football qui occupe les esprits. Après la victoire du Japon contre le Cameroun et la petite défaite contre les Pays-Bas, le pays se prépare à affronter le Danemark. Les écrans sont allumés, la bière est prête, les maillots sont fièrement arborés… le pays retient son souffle et crie Nihon Banzai ! Allez le Japon !
La littérature prend parfois de drôles de chemins de traverse pour nous atteindre.
En arrivant ici, j’ai voulu, par esprit de contradiction, lire « Un roman russe » d’Emmanuel Carrère. Celui-ci m’a emmenée vers Philippe Forest, qui m’a donné envie de découvrir Kenzaburô Ôe. Retour au Japon. Et découverte d’un conteur magnifique. Durant la seconde guerre mondiale, les garçons d’une maison de correction sont emmenés dans un village de montagne où sévit une épidémie mortelle et insaisissable. Sommés d’enterrer les carcasses pourrissantes des animaux décimés par la maladie, ils seront rapidement abandonnés à leur sort par les paysans. Au-delà d’une thème de l’enfance, c’est l’histoire de la fuite impossible que nous conte l’auteur. Fuir les mauvais traitements, fuir l’épidémie, fuir la guerre, fuir ses responsabilités ou fuir l’entrée dans l’âge adulte. Vaines tentatives ! On n’échappe pas à son destin. Et on peut bien être être aussi malin que le Petit Poucet, tous les chemins nous ramènent à l’ogre qui nous dévorera les entrailles.
Manque de maturité politique et de lisibilité gouvernementale, voilà ce qui aurait finalement coûté son poste à Yukio Hatoyama, premier ministre démocrate et prometteur s’il en est… De son bref passage pourtant, tout n’est pas à jeter ! Allocations familiales, coupes franches dans le budget des grands travaux de l’état, prise de position rapide et courageuse en faveur de l’environnement, débat sur les relations du Japon avec les États-Unis, toutes ces questions ont été abordées de front, dans une volonté de transparence et malgré de nombreux atermoiements. Mais les Japonais n’auront rien voulu entendre, ou attendre. Après une chute de popularité record, Yukio Hatoyama a laissé sa place à Naoto Kan. Dès sa prise de fonction, on vendait déjà sur internet d’étonnants t-shirts à son effigie et au « slogan » porteur : YES WE KAN.
Follement amoureuse de son maître de poésie, elle écrivit un recueil de poèmes autour de son désir naissant. Scandale. On est en 1901 au Japon. Elle a 23 ans. Elle épousera son mentor et 13 enfants naîtront de leur union. Yosano Akiko est l’une des grandes figures de proue du féminisme « bourgeois » du début du siècle. Son parcours, comme celui de nombreuses autres m’a été raconté ce matin lors d’une conférence passionnante. De la baronne bouleversée par le sort des femmes contraintes d’accoucher dans les mines où elles travaillent à l’ex-prostituée oeuvrant activement contre toutes les violences faites aux femmes… la sociologue Muriel Jolivet a fait revivre les luttes de ces combattantes exceptionnelles. Mais que reste-t-il de leurs idéaux ? Où en est le féminisme ici, dans un pays où les jeunes filles déclarent majoritairement vouloir se marier et rester à la maison ? Un piste d’explication : l’égalité réelle réservée à celles qui se lancent. Ainsi, arrivées aux mêmes postes que les hommes, les femmes bénéficient du même traitement : 11 heures de travail par jour, 2 semaines maximum de congé par an, une vie sans répit, sans soupape et… généralement sans mari. Aujourd’hui, cette vie-là les Japonaises n’en veulent pas. Qui pourrait les en blâmer ?
Imaginez une centaine de femmes mûres face à 5 garçons mèches au vent, costume chic mais cool, voix de velours et chorégraphie cadencée. Envoyez la tombola qui fera gagner un sac Chanel ou une montre Piaget. Versez une belle quantité de boisson à bulles qui fait rire plus fort et tourner les têtes. Vous entendrez le tintement du verre, le cliquetis de l’argenterie et le bruit des flashes. La salle de bal Art Déco du Ritz Carlton est vaste et elle se démultiplie dans les miroirs. Son Altesse Impériale, marraine de toujours, s’affiche digne et francophile. Les invitées portent de hauts talons et de lourds colliers. Les serveurs se courbent bas.
Vous assistez au déjeuner de gala des 35 ans des Amies de Langue Française, une association de dames très influentes qui promeut depuis 1975 les échanges culturels franco-japonais.
L’année dernière, j’assistais à une conférence passionnante sur la portée historique des élections japonaises. Pour la première fois depuis plus de cinquante ans, on voyait la « gauche » s’emparer du pouvoir. On attendait un changement radical sur la question des bases militaires américaines, l’émergence d’un nouveau leadership en Asie et la mise en place de mesures essentielles en faveur de la natalité, sujet crucial et plus actuel que jamais. L’environnement semblait devenir un enjeu majeur et les fonctionnaires craignaient déjà de se faire confisquer un peu de leur énorme pouvoir. Aujourd’hui, à l’épreuve de la réalité et des scandales financiers, la déception est là. L’opinion ne soutient plus son premier ministre dont on moque jusqu’aux chemises.
Yukio Hatoyama a présenté sa démission aujourd’hui.
Les prochaines élections sénatoriales de juillet décideront de la suite.