Archive for novembre, 2010
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La charmante Philippine qui vient chez moi une fois par semaine me faisait récemment remarquer qu’elle entend souvent les phrases inarticulées de personnes handicapées passant devant mes fenêtres. Certes, mon quartier est assez populaire (toutes proportions gardées, naturellement) mais je vis quand même près d’un lieu hautement symbolique. Hé ! hé ! jetez donc un oeil au nom de l’immeuble situé à deux pas de ma maison. Maison Blanche, voilà qui pose, voilà qui en impose. Je saisis donc la balle au bond et j’en profite pour vous parler de la passion japonaise pour les mots français. Incroyable ! Je vais acheter du pain chez Epi-ciel, je pourrais déjeuner au « Restaurant de bave » (un nom qui fait légitimement saliver) ou admirer les produits de beauté de Champ de herbe. Je vous rappelle que la célèbre griffe Comme des garçons est 100% made in Japan, qui l’eut cru ? Quant à cette amie française qui m’a gentiment offert un sac renversant de la marque Cocue (elle se reconnaîtra), je la remercie vivement pour cette délicate attention.
Ouh là ! Je m’empresse de partager avec vous cette grande nouvelle : j’ai trouvé dans un petit supermarché de mon quartier des yaourts… vendus par six ! Cela vous paraîtra peut-être dérisoire, mais pour moi cette découverte est révolutionnaire. Ici en effet, il sont généralement vendus à l’unité, voire par deux ou par quatre. Les grosses quantités ? Connaît pas. Les familles nombreuses qui engloutissent plusieurs laitages par jour ? Connaît pas. Le plein de courses hebdomadaire ? Connaît pas. Heureusement, cette découverte est tempérée par le format du pot qui, lui, reste tout à fait japonais : 70 g exactement contre 125 g en moyenne en France.
Je suis repartie sur les chapeaux de roue, toute émue d’avoir retrouvé ce pays et cette ville. Oui mais voilà, j’ai du boulot, moi ! Et donc, je ne peux entretenir quotidiennement ce blog. Ou alors, il me faudrait attacher mes filles, refuser des clients et installer une chaise devant ma porte pour scruter les regards et sentir l’air du temps. Remarquez, les vitres de mon salon donnent directement sur la rue, j’ai donc un poste d’observation tout trouvé qui ne m’oblige ni à sortir, ni à quitter mon ordinateur. Je vois les vieux penchés sur leur déambulateur, les petits enfants transportés par six dans de grands chariots par une responsable de crèche, les postiers qui filent comme le vent, les vendeurs de tofu ambulants, les curieux qui regardent les plantes du voisin et ceux qui me sourient à travers la fenêtre, tout surpris que nos regards se croisent.
Les invités attendus entre 20h et 20h30 ont été prévenus par Monsieur Loyal de l’arrivée imminente des héros du jour. On se positionne à l’entrée du restaurant, prêts à faire exploser les pétards fournis pour l’occasion. Clac, clac clac vive les mariés ! Madame est ravissante avec sa robe bustier et Monsieur sourit, l’air un peu gêné, sans doute n’est-il pas habitué à tous ces flashes qui crépitent autour de lui. On leur présente un grand gâteau qu’ils couperont mains jointes, chacun faisant ensuite goûter à l’autre une part de cette chose spongieuse et bourrée de crème. Mince, le marié en a partout ! Ils grignotent, on leur remet quelques cadeaux et on passe aux jeux. C’est à qui déroulera le plus vite un rouleau de papier toilette, qui finira son biberon le premier, qui connaît le mieux la vie de l’autre… l’ambiance est bonne enfant et pas si différente des mariages normands. Sur un grand écran, on passe au rétroprojecteur des photos des amoureux. Séquence émotion. Les invités épars parlent entre eux, indifférents à la fête. Mais il est déjà 22h15 ! On se met en rang pour dire au-revoir. On repartira avec deux sablés en forme de coeur et un charmant sourire de la mariée. Une dernière photo pour la route ?
L’animal que je rencontre chaque jour près de chez moi se balade au bout d’une laisse élégamment sertie de pierres brillantes roses et bleues. Il promène ses bouclettes blanches et sa maîtresse sous mon regard amusé. Sur son dos, le toiletteur a taillé un coeur en relief, absolument parfait.
Gageons que ce caniche star sera bientôt invité à Lalaport où un restaurant réserve aux animaux de compagnie un menu d’anniversaire dédié. Après avoir soufflé quelques bougies en son honneur, on aura à coeur de lui chanter Happy Dogday to you !
Avec un petit quart d’avance sur le planning, leur gros camion s’est garé comme une fleur dans le mouchoir de poche qui borde ma maison. Couvertures de protection sur les sols, portes vitrées habilement coincées par des cales, murs, rampe et miroirs recouverts de carton strictement scotché. Rien à dire, ces hommes sont de très grands professionnels. Et si j’ajoute qu’ils n’ont mis que trois heures à décharger cent quarante-sept cartons, montage compris des meubles les plus encombrants, vous comprendrez pourquoi je suis prête à redéménager demain.
Le petit sac à anses roses n’aura pas fait long feu dans les toilettes. Le temps de me rendre compte qu’il a été oublié, il s’est passé une seconde durant laquelle une dame bien intentionnée s’est empressée de récupérer l’objet pour l’apporter aussi sec au koban. Il me faut donc, à mon tour, et après enquête approfondie, me rendre dans ce poste de police pour y remplir un long questionnaire en japonais, indiquer sous le regard perplexe du représentant de l’ordre à quelle heure et dans quelles circonstances j’ai perdu ce maudit cabas, signer au bon endroit et ajouter l’empreinte de mon index trempé dans une belle encre rouge. J’ai perdu une heure.
Ils sont beaux, ils sont forts, ils sauvent des vies et en plus… ils sont pédagogues. Eh oui, ces héros des temps modernes sont les pompiers. Pas seulement ceux de Tokyo, ceux du Japon tout entier. Ici, on leur voue un véritable culte et je suis à deux doigts d’intégrer leur fan club. Ce week-end par exemple, ils organisaient une grande journée de prévention avec de nombreux stands pour les enfants. On s’essaie à l’utilisation de l’extincteur, on enfile leur costume et ce gros casque qu’ils portent sur la tête, on tente un massage cardiaque sur un mannequin plus vrai que nature, on se fait peur dans un simulateur de tremblement de terre et enfin… récompense ultime, on monte sur leur immense échelle pour admirer la ville vue d’en haut. Ah mes amis, dire qu’un de leurs représentants est venu chez moi ce matin pour m’apporter de la documentation sur les risques d’incendie. Tiens, si je n’avais pas été aussi timide, je l’aurais serré dans mes bras !
Dans ce roman du secret où tout ce qui est caché est su et inversement, les regards se croisent et se fuient, les faits se contredisent et s’éclairent. Voilà tout le génie de l’auteur qui interroge la réalité à la lumière de trois récits épistolaires, trois facettes d’une même histoire d’adultère. Car au fond, qui peut rendre compte de la complexité d’une telle aventure, l’épouse, la maîtresse ou sa fille ? Quelle est la part de sincérité et d’imposture dans nos actes, nos paroles, nos lettres ou même ces mots abrités dans le secret d’un journal intime ? Quand est-on vraiment soi-même et le sait-on jamais ?
Dans une langue incroyablement vivante – et à travers 88 pages seulement – Yasushi Inoue dresse le portrait magnifique de trois femmes blessées qui rappellent à chacun d’entre nous que la vérité est ailleurs.
Dans le mensonge peut-être.
NB : pour ce chef d’oeuvre, l’auteur a été récompensé du prestigieux prix Akutagawa en 1950.
Faut-il céder à l’appel des paillettes cinéphiles et pénétrer dans cette antre dont on murmure qu’elle aurait inspiré à Quentin Tarantino le décor du restaurant où se déroule cette scène époustouflante avec les crazy 88 dans Kill Bill ? Je craignais le toc et l’imposture, une ambiance surfaite, un coup commercial… A vrai dire, il y a un peu de cela dans cette immense salle en bois et aux boules de lumière qui tombent du plafond. Les serveurs parlent trop bien anglais et la clientèle touristique prend trop de photos en riant trop fort. Pour les puristes qui n’aiment rien tant que les auberges traditionnelles dont les menus ne sont qu’en japonais, le choc est sans doute à la mesure de la déception. Mais pour ma part, j’ai plutôt été séduite, insidieusement séduite. L’atmosphère légèrement factice, l’écran qui diffuse en boucle les images d’Uma Thurman, la vue panoramique qui s’offre depuis les balcons du premier étage sur les cuisiniers et les tables, la carte riche de mélanges étonnants – tempura au camembert et glace au sésame noir sur fondant au chocolat – le jeune responsable sud américain affreusement télégénique qui se souvient de chaque visage… tout cela contribue au charme de Gonpachi, un restaurant unique, qui fascine autant qu’il désoriente.
NB : Les vrais cinéphiles se rendront à « La jetée », bar du Golden Gai dont j’ai déjà parlé dans un précédent billet. Ravissement garanti, et en plus… la patronne parle français.