Tremble !
Chaque ami qui vient ici n’attend qu’une chose : éprouver sous ses pieds le sol instable, se frotter aux murs qui ploient et aux fenêtres qui craquent, ressentir ce frisson qui accompagne souvent les petits tremblements de terre que le pays accumule comme autant de records.
Mes invités repartent souvent déçus.
Quand je suis arrivée, j’étais pareille, curieuse de connaître ce sentiment de fragilité face aux forces de la nature et de pousser ce ouf ! de soulagement qui vient après la secousse.
Oui mais voilà, cela fait plus d’un an maintenant que je vis à Tokyo et l’intérêt du début a laissé place à une peur indéfinie et permanente. Ici, chacun attend le retour du Big One, celui qui a tué 143 000 personnes en 1923. On l’attend avec fatalisme, un carton de survie à portée de main.
C’est étrange de vivre avec cette épée de Damoclès au-dessus de la tête.
L’idéal, c’est de ne pas y penser bien sûr – sinon, il faut faire ses valises et rentrer bien vite en France.
Cette nuit à 4h00 du matin, la terre s’est rappelée à mon bon souvenir. Tremble a-t-elle dit.