Le théâtre
Loin du Kabuki et du Nô, je décide d’emmener quelques proches assister à une comédie musicale : The sound of music en japonais. Les paroles ne seront pas sous-titrées mais peu importe, nous connaissons l’histoire par coeur et il ne sera pas difficile de comprendre les paroles ou de reconnaître les personnages. Nous trouvons l’endroit, c’est au bien nommé Théâtre d’automne. L’enthousiasme nous fait frétiller et c’est à peine si nous remarquons le Guide des bonnes manières qu’une hôtesse nous glisse entre les mains. Las, la lecture de ce document clé nous aurait pourtant évité quelques rappels à l’ordre façon école de marines version US. A peine installés, en bons tatamisés que nous sommes devenus, nous sortons en effet… l’appareil photo. Quelle erreur ! Une hôtesse se précipite sur nous, pas question de prendre un cliché dans la salle ! Mais, arguons-nous, il n’y a personne sur scène, il s’agit seulement d’immortaliser l’ambiance. La tension monte, on sent que la dame va appeler les renforts (trois grands costauds minimum que nous imaginons forcément ceinture noire de karaté et armés jusqu’aux dents), nous posons l’arme du crime à terre. Le cerbère précise qu’il doit être placé dans un sac à l’abri des regards, nous nous exécutons. Le spectacle va enfin commencer. Bonheur. Il y a de vrais musiciens dans la fosse en contre-bas, je me penche pour les observer. Erreur encore ! Une autre hôtesse me tape sur l’épaule : il ne faut pas se pencher, mais se tenir bien droit sur son siège. Ah ? Je gêne donc ? Pardon. Je vous passe le descriptif de la première partie : les acteurs plus vrais que nature, le charme et la poésie de la mise en scène, l’émotion à fleur de peau et la musique… bref, une perfection qui nous enchante et nous touche. Chapeau. A l’entracte, pause pipi et boissons (l’un compensant l’autre), nous nous apprêtons à revenir à nos places quand l’hôtesse dite « oeil-de-lynx » nous accoste de nouveau. Interdiction d’emmener les bouteilles dans la salle. Mais, nous n’avons pas terminé, arguons-nous. Et, pensons-nous intérieurement, à 400 yens le Perrier, ça nous ferait mal d’avoir à jeter des bouteilles à moitié pleines. Taratata explose l’hôtesse, la règle, c’est la règle. Alors, proposons-nous, gardez donc nos boissons, nous les récupérerons après le spectacle. Arghl ! La miss s’étrangle, fume, et finit par céder. Mais elle nous tient à l’oeil, hein. Et attention : que les enfants se taisent et s’assoient au fond de leur fauteuil. La deuxième partie, comme la première, nous laisse pantois d’émotion. Le rideau tombe. Nous applaudissons à tout rompre, heureusement… ça, c’est permis.